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Culpabilité de l’aidant : comment gérer ce sentiment ?

Quand la culpabilité s’installe dans la vie de l’aidant

Crée le : · Mis à jour le : 14/11/2024 20:25:00 · Temps de lecture :

2 minutes

Peur de mal faire, de ne pas en faire assez, de n’être pas suffisamment présents… Les aidants vivent en permanence avec une certaine forme de culpabilité. D’où vient-elle ? Peut-on y échapper, ou au moins la dompter ? Nos conseils pour ne plus vous flageller !

C’est une compagne bien connue des aidants. Parfois un moteur, mais plus souvent une épine dans le pied. Et dans tous les cas un sentiment désagréable : la culpabilité, qui ne l’a jamais ressentie au cours de sa vie d’aidant ?

Comprendre la culpabilité de l’aidant

Aidant : pourquoi se sent-on coupable ? 

La culpabilité, c’est le sentiment d’avoir commis une “faute”, que cette faute soit avérée ou totalement imaginaire : on se sent coupable, finalement, lorsqu’on n’a pas été au rendez-vous d’une exigence qu’on s’impose à soi-même.

Pour un aidant, les causes les plus répandues sont :

  • la décision de placer son proche dans un établissement spécialisé comme un EHPAD (71 % des aidants en ressentent de la culpabilité[1]),
  • ne plus ressentir d’affection pour son proche (69 %),
  • avoir envie que “ça s’arrête” (65 %),
  • avoir le sentiment de ne pas en faire assez (63 %),
  • prendre du temps pour soi (47 %).

À cela s’ajoute une autre source de culpabilité : le proche aidé lui-même. Placé dans une relation de dépendance, demandeur de temps et d’attention, il peut consciemment ou inconsciemment culpabiliser son aidant.


Télécharger le guide - trouver du répit pour aider sans s’épuiser

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Parole d’aidant :
Ma femme atteinte de la maladie d’Alzheimer me reproche de l’avoir placée. Pourtant, j’ai tout essayé pour la garder à la maison mais j’étais au bout du rouleau.

Jean

La culpabilité : des causes sur lesquelles on a peu de prise

La source de la culpabilité, pour un aidant, remonte donc souvent :

  • à une impression : celle de mal faire, ou de ne pas en faire assez, ou d’être impuissant face à la dégradation de l’état de son proche…
  • à une réaction : énervement contre son proche, maladresse…
  • à un besoin, presque un réflexe de survie : s’échapper quelque temps, déléguer son fardeau d’aidant à un autre, et s’offrir un répit.

Autant d’éléments déclencheurs contre lesquels on ne peut malheureusement pas grand-chose… mais qu’il faut donc apprendre à gérer pour dépasser le sentiment de culpabilité (à défaut de s’empêcher de le ressentir).

La culpabilité : un mal qui grignote votre santé mentale

Car le problème, c’est que la culpabilité, mal gérée, non verbalisée, va s’accumuler. Et entraîner chez l’aidant :

  • une dégradation de l’estime de soi : dévalorisation, repli sur soi, frustration, irritabilité…
  • du stress et de l’anxiété, pouvant conduire à la dépression,
  • une diminution des facultés cognitives (concentration, mémoire), qui peut avoir un impact sur la vie quotidienne mais aussi professionnelle,
  • parfois, des impacts à long termes sur la santé (forme, sommeil).

C’est donc loin d’être anodin : aux premiers signes de culpabilité excessive, il faut mettre en place des stratégies pour la surmonter.

Pour aller plus loin : Burn-out de l'aidant : comment le reconnaître et le prévenir

L’avis de Graziella Cotti, psychologue clinicienne et psychologue du travail
La culpabilité a deux facettes, une visible (ressentie et exprimée) comme un devoir, l’autre invisible (et inconsciente) qui s’enracine dans une dette insolvable, dans un désir interdit qui a pu surgir sur le chemin de la maturité psychologique, qu’il s’agisse de la vie que nous devons à l’aidé, du désir de se débarrasser d’un lien, ou de tout autre élément lié à notre histoire réelle mais aussi inconsciente.
La culpabilité est le plus mauvais des moteurs, elle conduit l’aidant à être en échec (suicide social ou professionnel, échec des démarches effectuées pour l’aidé) ou à payer le prix fort en retournant cette agressivité contre soi de façon active et plus grave encore (isolement, troubles alimentaires, tabagisme excessif, alcool…).

Quelles techniques pour gérer la culpabilité ?

Pratiquer l'autocompassion

L’autocompassion ? C’est tout simple : il s’agit de se montrer aussi compréhensif envers soi-même, ses “faiblesses”, ou  ses “défauts”, qu’on le serait avec une personne qu’on aime dans la difficulté.

Plus facile à dire qu’à mettre en pratique ? C’est vrai : cela suppose d’avoir suffisamment de recul sur soi, et d’être capable de faire la part des choses entre :

  • vos “vrais” échecs, pour lesquels la culpabilité vous incite à faire mieux la prochaine fois,
  • vos échecs “subis”, mal vécus mais dont vous n’êtes pas responsable.

Pour cela, pas de formule magique : des temps de réflexion et de déconnexion vous aideront à y voir clair.

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<h3>Mobiliser d’autres aidants

La culpabilité heurte d’autant plus lorsqu’on est seul face à soi-même. Mobiliser d’autres aidants permet de sortir de ce cercle vicieux :

  • en ne portant plus seul le fardeau de l’aidant, mais en délégant une partie de vos responsabilité à d’autres proches,
  • en échangeant avec d’autres personnes qui vivent les mêmes situations que vous : groupes de parole, plateformes téléphoniques ou d’échange en ligne…

Faire appel à un professionnel

Si la culpabilité en vient à mettre à mal votre santé mentale, il est peut-être temps de vous faire accompagner ? Psychologue, thérapeute, sophrologue… il existe de nombreux professionnels aptes à :

  • prévenir l’épuisement psychologique,
  • apporter une écoute et un recul pour mettre des mots sur les maux,
  • apporter des clés de compréhension et d’action pour apprendre à surmonter sa culpabilité.

Pour aller plus loin : Aidant familial : quels dispositifs de soutien

L’avis de Graziella Cotti
Pour éviter ce parcours, sans aucun bénéfice tant pour l’aidé que l’aidant, relire et comprendre son histoire affective est capital. Il existe pour cela diverses pratiques, de la psychothérapie à l’arbre généalogique, en passant par les groupes de parole.
Même après l’accompagnement de l’aidé, la culpabilité peut induire des conséquences dramatiques (tumeurs, dépressions mélancoliques…). Il n’est jamais trop tard pour solliciter une aide dans une démarche d’indulgence (vis-à-vis de soi) et d’humilité.

Les solutions de répit : une cause autant qu’une réponse à la culpabilité de l’aidant

Pouvoir faire des pauses dans leur relation d’aide, s’offrir du temps à eux, c’est LE besoin le plus souvent exprimé par les aidants. Cela porte un nom, et c’est même inscrit dans la loi : le droit au répit.

Le paradoxe ? C’est que ces moments de répit sont aussi l’un des principaux vecteurs de la culpabilité de l’aidant, qui a du mal à accepter de ne pas être “l’aidant parfait”, 100 % disponible pour son proche.

La conséquence ? Les solutions de répit, qui existent bel et bien, sont mal connues des aidants. Et peu utilisées lorsqu’ils les connaissent. D’après un sondage Ipsos pour le magazine Notre Temps [1] :

  • Les aidants connaissent mal les congés auxquels ils ont droit (68 % des aidants ont entendu parler du congé de solidarité familiale, et 64 % du congé de proche aidant) et respectivement 4 % et 5 % en ont déjà bénéficié ;
  • Le droit au répit est une notion méconnue (68 % ignorent son existence, 4 % y ont eu recours) ;
  • Le dispositif de dons de jours de RTT est un peu moins abstrait (55 % des aidants le connaissent), mais guère plus employé (6 %).

Ma Chère Famille : le droit au répit

Qu’est-ce que le répit ? Un droit, déjà, inscrit dans la loi depuis 2015. Mais aussi une idée évidente quoique pas si simple à réaliser : prendre soin d’une personne en perte d’autonomie, c’est aussi prendre soin de ceux qui l’aident et ont besoin de plages de répit. Henri de Rohan Chabot, le délégué général de la Fondation France Répit, fait le point dans cet épisode de notre série documentaire “Ma Chère Famille”.


Ces dispositifs de répit, et bien d’autres encore (vacances répit, solutions de garde, de relai ou d’hébergement temporaire…), qu’une ​​plateforme d’accompagnement et de répit saura vous aider à identifier, ne sont pourtant pas un luxe, mais bien une nécessité. Car la première condition pour être disponible pour votre proche, c’est déjà d’être vous-même au meilleur de votre forme !

Pour aller plus loin : Les plateformes de répit, premier maillon de l'aide aux aidants


[1] Source : Sondage Ipsos pour Notre Temps, juillet 2019


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