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Burn-out de l’aidant : comment le reconnaître et le prévenir ?

Burn-out de l’aidant : comment le reconnaître et le prévenir ?
Crée le : · Mis à jour le : 25/08/2023 11:27:54 · Temps de lecture :
9 minutes

Cumul des responsabilités personnelles et professionnelles, surcharge mentale… Votre rôle de proche aidant vous éprouve beaucoup. Au point de vous mener au burn-out ? Le phénomène est réel. Voici comment déterminer si vous en souffrez, et comment vous en préserver.

Vous êtes aujourd’hui près de 11 millions d’aidants à soutenir un proche en perte d’autonomie pour des raisons liées à son âge, un handicap, une maladie chronique ou invalidante. Mais votre rôle n’est pas toujours facile. Selon le Baromètre OCIRP 2016, « L’âge de l’autonomie », près d’un tiers d’entre vous meurent avant le proche dont vous prenez soin et vous êtes :

  • 44% à éprouver des difficultés pour concilier votre rôle d’aidant avec votre vie professionnelle
  • 31% à délaisser votre propre santé
  • 32% à souffrir d’une fatigue physique chronique.

De l’épuisement au burn-out, il n’y a qu’un pas. Mais encore faut-il comprendre ce qu’est le burn-out de l’aidant pour pouvoir le reconnaître et le prévenir. Symptômes, causes, risques et prévention : Essentiel Autonomie fait le tour de la question.

Aidants familiaux : pourquoi êtes-vous exposés au burn-out ?

Utilisé pour la première fois dans les années 70, le concept du burn-out a d’abord servi à désigner l’état d’épuisement au travail des personnels de l’aide et du soin. Ce n’est certainement pas une coïncidence si les aidants y sont, eux-aussi, particulièrement exposés : le chiffre d’1 aidant sur 5 proche du burn-out circule beaucoup. Simple estimation ou fait avéré, il révèle en tout cas l’ampleur d’un phénomène qui s’explique par une multiplicité de facteurs favorisant un état de stress chronique lourd de conséquences

Proche aidant : une charge lourde à porter

Être un proche aidant n’est pas un travail quelconque, mais un rôle investi physiquement et émotionnellement. En plus de prendre en charge un proche en perte d’autonomie, l’aidant partage en effet avec lui sa souffrance ainsi que ses angoisses face à la maladie.

Par ailleurs, il ne faut pas négliger la dimension évolutive des pathologies et troubles du proche aidé : la charge à assumer devient ainsi plus lourde chaque jour de même que la peur de perdre la personne dont on s’occupe.

Enfin, cette responsabilité s’ajoute aux responsabilités professionnelles des aidants : 61% d’entre eux s’occupent de leur proche tout en continuant à travailler.

A lire aussi : Vous êtes aujourd’hui 4 millions à jongler entre votre carrière et l’assistance à un proche. Découvrez comment concilier vie pro, vie perso et vie d’aidant.

Pas de répit pour le proche aidant

"J’ai passé trois ans sans sortir. J’avais perdu 18 kilos. Je faisais tout au pas de course pour être le plus possible auprès d'Alain. Mon médecin me disait que j’allais faire un burn-out. Mais je pensais tenir le coup ! (…) Même lorsqu’Alain était sous surveillance médicale, je restais auprès de lui." Virginie, aidante

Prendre soin de quelqu’un est une responsabilité quotidienne, voire journalière face à laquelle on peut d’ailleurs se sentir très seul : 8 aidants sur 10 ont ainsi le sentiment de ne pas être assez soutenus ou considérés par les pouvoirs publics. A cela s’ajoute la difficulté à déléguer : demander à quelqu’un de prendre le relais est parfois interprété comme un aveu de faiblesse et source de culpabilité.

Or la place du proche aidé dans la vie quotidienne est souvent très importante, voire envahissante : 1 aidant sur 4 déclare consacrer 20h et plus à soutenir un proche. Parfois au détriment de sa santé, très souvent au détriment de sa vie sociale, personnelle et familiale. Dans les cas les plus extrêmes, les proches aidants s’isolent peu à peu de leur entourage pour ne plus se consacrer qu’aux proches qui ont besoin d’eux.

Un « droit au répit » a bien été prévu par la loi, mais il est peu utilisé dans les faits : il n’est donc pas rare de voir les aidants familiaux éprouver une sensation d’étouffement, voire de piège qui se referme, face à cette situation, sans qu’ils parviennent toutefois à en sortir.

BON A SAVOIR
Aidants familiaux : qui sont-ils ? Que vivent-ils ? De quels droits jouissent-ils ? Tour d’horizon d’un statut encore peu reconnu et pourtant de plus en plus partagé.

La détérioration de la situation financière du proche aidant

Prendre soin d’un proche a un coût financier : prestations médicales, achat de matériel adapté ou financement de séjours dans des établissements d’accueil sont autant de dépenses qui alourdissent le budget.

Or, la prise en charge d’un proche avec les soins quotidiens, les rendez-vous médicaux ou les conduites journalières oblige parfois à un désengagement de l’activité professionnelle et les conséquences sont alors lourdes à porter : entre le manque d’efficacité au travail à cause de la fatigue ou la prise de congés sans soldes, les aidants connaissent souvent une baisse de leurs revenus et éprouvent la peur de voir leur progression stagner, voire leur poste supprimé.

Ainsi, les difficultés financières rencontrées alimentent très souvent l’état de stress chronique.

EN SAVOIR PLUS
Vous aidez un proche en perte d’autonomie et vous devez arrêter de travailler ou diminuer votre activité professionnelle ? Découvrez comment devenir aidant salarié.

De l’épuisement de l’aidant familial au burn-out : 3 indices qui doivent vous alerter

Dérivé du verbe anglais qui signifie « consumer, brûler entièrement », le terme « burn-out » a été utilisé dans le domaine professionnel pour désigner un syndrome d’épuisement professionnel résultant d’un stress chronique au travail qui n’a pas été correctement géré. Par analogie, le terme est désormais appliqué à un état similaire : le syndrome de l’aidant ou burn-out de l’aidant. Pour comprendre ce qu’est le burn-out de l’aidant et savoir en reconnaître les signes, il existe trois grands types de symptômes auxquels être attentif.

1. Un épuisement émotionnel, physique et psychologique

La lutte quotidienne contre la perte d’autonomie du proche dont vous avez la charge vous expose à un stress permanent qui se manifeste, en premier lieu, par un état de fatigue intense, voire chronique, un peu comme si toutes vos ressources étaient épuisées :

  • sur le plan émotionnel, vous devenez très (trop ?) sensible ou irritable
  • sur le plan physique, vous vous sentez fragilisé : vous êtes sujet à des infections de plus en plus nombreuses et des douleurs chroniques (mal de dos, maux de têtes, de ventre …)
  • sur le plan psychologique, enfin, vous éprouvez un stress intense, parfois des angoisses, votre sommeil est perturbé et votre humeur, changeante

Votre rôle de proche aidant est donc une lourde responsabilité qui éprouve le corps et l’esprit et dont les conséquences ne doivent pas être négligées.


Télécharger le guide - concilier vie professionnelle et rôle d’aidant

2. Un détachement et un désinvestissement

Quand votre rôle de proche aidant devient trop lourd à porter, que votre tâche vous semble trop exigeante, votre inconscient réagit pour vous protéger : il vous fait prendre de la distance.

Vous vous repliez alors sur vous-même jusqu’à vous détacher de vos responsabilités. Vous incriminez votre entourage pour ce mal-être et vous en arrivez à une certaine indifférence face à leur souffrance, parfois même une forme de cynisme, voire d’agressivité.

Cela n’a rien à voir avec les sentiments qui vous lient au proche dont vous avez la responsabilité. C’est un mouvement d’autodéfense révélateur d’un véritable mal-être d’autant plus lourd à porter qu’il s’accompagne généralement d’un sentiment de culpabilité.

3. Une forme d’autodépréciation

À l’inverse, vous pouvez être assailli par un sentiment d’échec, d’inutilité, d’incapacité à être à la hauteur de votre rôle. Doutes et culpabilité vous accablent et vous empêchent de vous occuper correctement du proche dont vous vouliez pourtant prendre soin. Malgré tous vos efforts, vous avez la sensation d’être dans une impasse.

Si vous observez la présence récurrente de l’un ou plusieurs de ces symptômes, il est urgent d’aller consulter un professionnel qualifié pour diagnostiquer un burn-out de l’aidant. Cela vous permettra d’être soutenu et accompagné.

Aidants familiaux : mesurer votre épuisement avec l’échelle de Zarit

L’échelle de Zarit : de quoi s'agit-il ?

Également appelée “inventaire du fardeau”, l’échelle de Zarit permet de calculer objectivement la charge (émotionnelle, physique, financière…) ressentie par le proche aidant.

À travers ce test de 22 questions, vous allez pouvoir établir votre niveau de fatigue et mesurer vos limites. Répondez-y en indiquant pour chaque situation si elle vous arrive :  

  • 0 : jamais,
  • 1 : rarement,
  • 2 : quelquefois,
  • 3 : assez souvent
  • 4 : presque toujours.

Après avoir répondu à toutes les questions, il vous suffit d’additionner les “points” obtenus : 

  • vous avez entre 0 et 20 points, votre charge d’aidant est considérée comme très faible,
  • vous avez entre 21 et 40 points, votre charge est légère,
  • vous avez entre 41 et 60 points, votre charge est modérée, 
  • vous avez plus de 60 points, votre charge est sévère.

Calculer votre charge d'aidant avec l’échelle de Zarit

Les champs marqués d’un astérisque (*) sont obligatoires
A quelle fréquence vous arrive-t-il de… Jamais Rarement Quelquesfois Assez souvent Presque toujours
Sentir que votre parent vous demande plus d’aide qu’il n’en a besoin ?
Sentir que le temps consacré à votre parent ne vous en laisse pas assez pour vous ?
Vous sentir tiraillé entre les soins à votre parent et vos autres responsabilités(familiales ou de travail) ?
Vous sentir embarrassé par les comportements de votre parent ?
Vous sentir en colère quand vous êtes en présence de votre parent ?
Sentir que votre parent nuit à vos relations avec d’autres membres de la famille ou des amis ?
Avoir peur de ce que l’avenir réserve à votre parent ?
Sentir que votre parent est dépendant de vous ?
Vous sentir tendu en présence de votre parent ?
Sentir que votre santé s’est détériorée à cause de votre implicationauprès de votre parent ?
Sentir que vous n’avez pas autant d’intimité que vous aimeriezà cause de votre parent ?
Sentir que votre vie sociale s’est détériorée du fait que vous prenez soin de votre parent ?
Vous sentir mal à l’aise de recevoir des amis à cause de votre parent ?
Sentir que votre parent semble s’attendre à ce que vous preniez soin de luicomme si vous étiez la seule personne sur qui il puisse compter ?
Sentir que vous n’avez pas assez d’argent pour prendre soin de votre parentencore longtemps compte tenu de vos autres dépenses ?
Sentir que vous ne serez plus capable de prendre soin de votre parentencore bien longtemps ?
Sentir que vous avez perdu le contrôle de votre vie depuis la maladie de votre parent ?
Souhaiter pouvoir laisser le soin de votre parent à quelqu’un d’autre ?
Sentir que vous ne savez pas trop quoi faire pour votre parent ?
Sentir que vous devriez en faire plus pour votre parent ?
Sentir que vous pourriez donner de meilleurs soins à votre parent ?
En fin de compte, à quelle fréquence vous arrive-t-il de sentir que les soins à votre parent sont une charge, un fardeau ?
0 points

Pour aller plus loin : Aidant familial : quels dispositifs de soutien

À quels risques vous exposez-vous avec le burn-out de l’aidant ?

Il y a une corrélation étroite entre l’état du proche aidant et celui du proche aidé : quand on ne va pas bien, on ne peut pas bien prendre soin de quelqu’un d’autre. Ainsi, outre la dégradation de l’état de santé de l’aidant, un burn-out peut aussi porter préjudice au proche en perte d’autonomie.

Une dégradation de l’état de santé de votre aidé

"Le répit est indispensable. En s’épuisant, l’aidant peut devenir maltraitant sans s’en rendre compte. L’important est la personne aidée et qu’elle soit heureuse avec l’affection et les soins quotidiens qui lui sont apportés. La poussière peut attendre…" Isaac, responsable d’un service d’aide à la personne.

Avec la fatigue et le stress, vous risquez d’oublier des rendez-vous, des médicaments. Vous pouvez aussi rencontrer de plus en plus de difficultés à effectuer plusieurs tâches en même temps ou à vous organiser.

Cela peut avoir des conséquences directes sur la situation du proche dont vous avez la charge : sans stimulation et avec des traitements mal suivis, son état de santé peut se dégrader très rapidement. Pire, si vous manquez de lucidité, vous pouvez mettre votre proche en danger par exemple en n’anticipant pas des infections ou en ignorant l’apparition de nouveaux symptômes.

Une dégradation de votre relation aidant-aidé

Eprouvé par la fatigue, accablé par le sentiment d’être dépassé ou dépossédé de votre propre vie, il peut vous arriver de manifester des signes d’impatience, d’agacement et parfois d’agressivité envers votre proche. Dans les cas les plus graves, certains proches en perte d’autonomie peuvent subir une forme de maltraitance, physique ou psychologique.

Sans en arriver à de telles extrémités, la qualité de votre relation risque de se dégrader. Que ce soit pour vous comme pour le proche aidé, il est donc vital de ne pas ignorer les signes avant-coureurs d’un burn-out et faire tout ce qui est possible pour l’éviter.

Comment prévenir ou soigner un burn-out ?

Parce qu’il faut savoir prendre soin de soi pour prendre soin de l’autre, il vous faut être attentif à votre propre état de santé. 

La loi d’adaptation de la société au vieillissement, entrée en vigueur en 2006, définit le statut d’aidant familial et lui reconnaît des droits : n’hésitez pas à faire valoir vos droits et utiliser toutes les ressources à votre disposition pour être accompagné dans votre rôle et recevoir une aide adaptée à votre situation.

Les conseils de Graziella Cotti, psychologue clinicienne et psychologue du travail

L’oubli de soi : il s’agit d’un ressenti que l’on ne peut reconnaître comme tel et que l’on projette sur son interlocuteur. Lorsqu’un aidant n’a ni confiance en lui, ni en la personne aidée, il pense qu’aucune autre personne ne sera capable de s’en occuper et de faire ce qu’il faut.

Pourtant, il ne faut pas attendre pour consulter, quand un aidant éprouve de la difficulté à faire les choses, les penser, les organiser ou qu’il a des problèmes de sommeil ou d’alimentation, c’est que ses limites sont atteintes. Alors avant l’écroulement, il vaut mieux consulter.

Se faire diagnostiquer : une priorité

A ce jour, l’OMS n’a toujours pas reconnu le burn-out comme une maladie professionnelle, mais elle l’identifie comme un syndrome qui peut conduire au basculement dans des pathologies comme la dépression.

Si vous vous sentez fragilisé physiquement ou psychologiquement, il est urgent de consulter pour être pris en charge.

Pour cela, vous pouvez adresser à votre médecin traitant, à la médecine du travail, à un psychiatre ou même à un psychologue. La Haute Autorité de Santé a établi un mémo qui facilite le repérage et la prise en charge de ce syndrome et les professionnels de santé disposent de tests fiables et reconnus tels que le Maslach Burnout Inventory (MBI).

Trouver du répit et passer le relais

Il existe de nombreux droits que vous pouvez faire valoir pour vous offrir un moment de pause.

Le droit au répit

Encore méconnu, le droit au répit reconnaît l'importance et le rôle des proches aidants, et prévoit plusieurs dispositions pour leur permettre de prendre un temps de repos.

Comment ? Dès que le plafond du plan d’aide APA de la personne aidée est atteint, vous pouvez toucher votre droit au répit et l’utiliser pour financer, dans la limite de 500 euros par an, l’une des solutions de répit suivantes :

  • l’accueil du proche aidé dans une structure d’hébergement temporaire, en établissement ou en accueil familial ;
  • la prise en charge de la personne en perte d’autonomie dans un accueil de jour ou de nuit ;
  • des heures d’aide à domicile.

BON A SAVOIR
Aidant familial : découvrez le « droit au répit » et les solutions qu’il vous apporte pour souffler et passer le relais.

Le congé de proche aidant

Ce congé permet à l’aidant de suspendre son contrat de travail pendant une durée de 3 mois renouvelables afin de prendre soin de son proche. Ce congé ne peut être ni reporté ni refusé par l’employeur.

Faire valoir ses droits à des aides financières

Il existe plusieurs solutions financières pour alléger le coût de la prise en charge d’un proche en perte d’autonomie. Il s’agit, par exemple, de :

  • APA qui permet de financer le maintien à domicile ou les frais en EHPAD
  • la PCH qui prend en charge une partie des dépenses liées à la perte d’autonomie.

Trouver des solutions de soutien et d’écoute

Prévenir et éviter un burn-out passe aussi par des solutions qui permettent d’en alléger la charge mentale. Et elles sont nombreuses.

Les groupes de paroles

Il existe tout d’abord des lieux d’espaces et de rencontres comme les « Cafés des Aidants » : véritables groupes de paroles, ils permettent aux proches aidants d’échanger sur leurs problématiques, trouver des solutions ou du soutien.

Les solutions d’écoute à distance

Cette écoute peut aussi se trouver en ligne ou de manière virtuelle. Pour entrer en contact avec d’autres aidants, il existe des plateformes telles que Bonjour Fred qui mettent à votre disposition du contenu et des conseils pratiques pour avancer dans votre parcours d’aidant. Des permanences téléphoniques sont aussi disponibles 24h/24 et assurées par des experts de l’aidance.

Les associations d’aidants

Enfin, il ne faut pas hésiter à faire appel à des associations telles que la Maison des Aidants qui sont spécialistes de la question et qui seront en mesure de vous proposer des solutions pour prévenir et accompagner un éventuel burn-out.

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Vous prenez soin d’un proche dépendant et vous vous sentez fatigué et débordé : trouvez des solutions et des interlocuteurs pour en parler.


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